La souris qui ne rugissait pas

Publié le 19/07/2025

« L’ambassade de Russie à Paris s’indigne du changement de nom du boulevard Stalingrad dans la petite ville de Drap, près de Nice » (Le Parisien, 17 juillet). Les agents du KGB (pardon, FSB), déguisés en diplomates, fustigent une « décision cynique et honteuse, qui relèvent de la réécriture de l’histoire » (ils s’y connaissent, en la matière). Le Quai d’Orsay (s’il n’est pas fermé, l’été) pourrait envoyer un diplomate à l’ambassade russe pour confirmer le fait que les Français ont tous le plus grand respect pour le comportement exemplaire des soldats russes et de la population de la ville de Stalingrad, dont la résistance héroïque et les sacrifices inouïs ont constitué un tournant décisif dans la lutte contre le nazisme (ouf!). Avec le tact pluri séculaire dont nos diplomates sont capables, il pourrait ensuite avancer le fait que le malaise, avec Stalingrad, c’est le nom de Staline. Notre envoyé à canne, haut de forme et gants beurre frais pourrait suggérer, avec la plus exquise délicatesse, que pour les Français il n’est pas le petit père des peuples mais un terrible dictateur sanguinaire, que les derniers staliniens français sont morts ou bavent leurs derniers jours en EPHAD et qu’en France il n’y a aucune artère ni place qui porte le nom de Mao Tsé Tung, un autre grand criminel du vingtième siècle. Cela devrait suffire à calmer les peurs ataviques et les délires paranoïaques héréditaires des loups diplomates russes, qui semblent terrifiés par cinq mille Drapois et Drapoises, habitants de cette charmante commune des Alpes maritimes qui, contrairement au Duché du Grand Fenwick du roman de Leonard Wibberley de 1955 (La souris qui rugissait), et du film du même nom de Jack Arnold, en 1959, ne disposent pas d’une bombinette atomique trouvée par hasard.